L’annonce de la pandémie et plusieurs mois de confinement auront largement suffi à bouleverser nos quotidiens. Dans nos vies personnelles comme professionnelles, le mot d’ordre était (et reste toujours) l’adaptation. Mais pour les acteurs du monde des études (annonceurs ou agence), d’autres injonctions sont venues rythmer les journées de travail : agilité, résilience, innovation, digitalisation…
Pour faire face à ce nouveau paradigme et mieux comprendre les différents impacts de la crise sanitaire sur le monde des études, j’ai participé à la Journée Nationale des Etudes organisée par l’ADETEM (association nationale des professionnels du marketing).
Ce rendez-vous réunissait une quinzaine d’experts sur 4 jours, qui, au fil des tables rondes et des ateliers, ont décrypté les codes de ce monde des études en pleine ébullition. Alors, quels sont les grands changements à retenir, pour les annonceurs comme pour les agences ?
1. L’importance de l’ethnographie réaffirmée, pour comprendre et anticiper les comportements
A situation imprévisible, comportements imprévisibles. Pour les marques, les agences et les instituts d’étude, la crise du Covid-19 a marqué le début d’une nouvelle ère. Il a fallu trouver “de nouvelles opportunités dans la douleur” comme le souligne Philippe Rondeau, directeur marketing de Sodebo. Face à des ventes qui s’effondrent et des comportements de consommation qui se transforment, il a fallu écouter et observer, pour mieux comprendre et anticiper.
Dans ce contexte d’accélération des tendances et de comportements bouleversés, le rôle de l’ethnographie a été indispensable pour nombre d’annonceurs. Son importance s’est réaffirmée et son déploiement s’est réinventé avec comme contrainte la distanciation sociale.
Chez Orange , face à l’accélération des pratiques digitales, et la fermeture des boutiques, un outil de communauté online de 4 mois a été mis en place au niveau international avec un reporting hebdomadaire.
Chez Sodebo, c’est également un besoin de compréhension et d’empathie qui a guidé la mise en place de communautés de clients et d’études ethnographiques pour identifier les pratiques et les besoins en période de confinement.
Pour Pernod Ricard, c’est une agrégation d’outils, comprenant l’ethnographie et la netnographie, qui vient donner du sens et révéler les aspirations sous-jacentes des clients et donc de nouvelles « plateformes d’opportunités » pour la marque.
Côté Instituts, la digitalisation des pratiques a bien sûr incité à se réinventer pour faire de l’ethnographie différemment.
Pour In’process par exemple le travail de préparation en amont a été beaucoup plus conséquent et les autos-ethnographies se sont accélérées. Pour embarquer les clients au sein d’enquêtes ethnographiques à distance, la créativité doit aussi primer et, sur ce point, ce sont des designers d’expérience qui interviennent pour scénariser des mises en situation.
Pour Free Thinking, c’est aussi « l’écoute créative », et le fait de rentrer en conversation active avec les individus (co-construction) qui permet de comprendre et d’anticiper les changements à venir.
Chez Tell Me More, c’est la mise en place de communautés de clients online, de newsletters hebdomadaires et d’expériences immersives filmées qui nous ont permis d’entrer dans l’intimité des clients ou collaborateurs, pour comprendre leurs besoins réels et leurs motivations.
Mais quelle que soit l’approche ethnographique retenue, les annonceurs sont face à la même urgence : celle de comprendre ce qui se dit et ce qui se fait aujourd’hui (sous l’angle sociétal, émotionnel et environnemental, comme le dit très justement Éric Trousset chez La Poste) pour anticiper les comportements de demain. Dans un monde en constante mutation, l’anticipation, la vision sociologique permet de ne pas subir. C’est tout l’enjeu de la tendance suivante, celle de la prospective.
2. L’analyse des tendances pour avoir une vision prospective
Pour construire, réaliser et diffuser une étude en 2020 (ou en 2021), travailler sous le prisme de la prospective devient un prérequis. Pour Xavier Charpentier (co-fondateur de Free Thinking), “les révolutions commencent plus tôt qu’on ne le pense” : il est donc urgent d’identifier les signes du changement avant même que ces changements ne surviennent.
Pour y parvenir, l’analyse des tendances est une approche qui s’ancre dans les habitudes. Ainsi, la veille concurrentielle, les tendances sociétales et environnementales ou l’évolution des habitudes de consommation deviennent un socle indispensable pour les annonceurs. Se questionner sur les tendances en cours ou à venir permettent de tendre vers une vision prospective.
Pour Philippe Cahen (prospectiviste), la première étape consiste, par l’analyse des signaux faibles, de différencier les tendances des prospectives et d’identifier les ruptures qui vont permettre aux marques d’anticiper et de s’adapter.
Lors des conférences de la JNE, les témoignages convergent vers cette nécessité de s’appuyer plus que jamais sur l’analyse de tendances.
Chez Décathlon, une phase de consolidation d’études et d’analyse des tendances (en matière d’éco-conception, de naturalité, de nutrition ou bien-être). a permis de redéfinir la vision et la mission de l’entreprise résolument tournée vers l’avenir.
Pour Samsung Electronics, ce sont des rapports multi sources (data analytics, insights , analyses comportementales) réalisés de manière trimestrielle qui permettent à l’entreprise d’être en veille permanente.
Ainsi, quelles que soient les entreprises interrogées, le sentiment commun est le suivant : la crise du Covid a été un accélérateur de tendances préexistantes plus qu’une rupture totale. L’analyse des tendances constatées et des insights collectés permet d’être dans une logique d’anticipation et de projection.
Chez Tell Me More, nous avons d’ailleurs mis en place un travail de veille quotidien qui nous permet d’ancrer nos analyses dans les tendances du marché… c’est aussi la publication de 2 articles par mois sur LinkedIn (comme celui-ci), qui aide les marques à se projeter dans le monde de demain.
3. La co-construction et la collaboration comme puissant levier d’innovation
Parmi les leçons à tirer de la crise sanitaire, on note également la force du collectif qui, pourles marques comme pour leurs clients, se traduit par la création de communautés de clients, par la démocratisation des insights et la co-construction autour de projets commun en interne ou encore la collaboration entre instituts, agences et annonceurs…
Nous sommes entrés dans l’ère de la co-création, du partenariat et du Do It Together permettant de croiser les visions, les expertises et de faire preuve d’adaptation permanente.
Pour y parvenir efficacement, et s’adapter à son marché Lamie Mutuelle a par exemple mis en place un modèle d’organisation d’entreprise plateforme basée sur l’agilité et la capacité à s’adapter et se réinventer. Cette organisation centrée autour de 3 bassins d’innovation a permis par exemple de construire en 4 semaines une nouvelle marque à destination des jeunes actifs en co-création étroite avec des jeunes et des étudiants.
Du côté des apporteurs de solutions, In’Process explique par exemple comment la mise en place de communautés articulées autour de jeux d’interaction (photos, vidéos, écrits, etc), de la co-construction de l’analyse avec le client et de la scénarisation de la restitution ont permis de travailler main dans la main avec le client au service de l’innovation.
Pour Incapsule by IFOP, l’engagement du collectif est la garantie de l’innovation réussie. La co-construction peut certes se déployer en externe (en mobilisant les clients via des communautés, comme le font aussi Orange ou Décathlon), mais également en interne. A ce sujet, l’IFOP conseille la création d’un programme relationnel en interne pour construire une relation collaborateur aussi forte que la relation client, afin de renforcer la dynamique d’innovation collective et de créer un socle de réflexion commun.
Finalement, la crise est un accélérateur de transformations. Co-création, communautés de clients, collaborations et partenariats… Voici les démarches collectives qui facilitent l’innovation, et qui sont également au cœur des actions de Tell Me More, dont la mission est la suivante : reconnecter les marques avec leurs clients grâce à des approches immersives et collaboratives.
4. L’alliance de la digitalisation des solutions et du DIY
Pour clôturer ce tour d’horizon des tendances dans le monde des études, il est nécessaire de se pencher sur un grand changement survenu en 2020 : la digitalisation massive et imposée. La distanciation amène les annonceurs, les agences et les consommateurs à repenser toutes leurs méthodes de communication et de travail. Pour réussir ce passage au 100% digital, chacun doit faire preuve de résilience, et d’agilité. Cette agilité nécessaire est renforcée par une autre tendance forte chez les annonceurs : le Do-It-Yourself (DIY) pour accélérer les process et standardiser certaines pratiques.
Certains annonceurs comme Pernod Ricard ont fait le choix de “prendre le meilleur des études et l’associer aux nouvelles technologies, pour plus d’efficacité, de rapidité et de fluidité”. De la collecte d’insights à la restitution des résultats, tout se passe maintenant en ligne. Les expériences clients digitalisées s’alignent avec les solutions mises en place par les entreprises. Sodebo témoigne d’une “accélération de nouvelles méthodes”, qui leur a permis d’interroger à distance les consommateurs confinés. Pernod Ricard partage ses différentes méthodologies axées sur le digital, qui permettent notamment de faire remonter des insights simplement entre les mains du marketing. Chez Samsung Electronics, enfin, le grand sujet en cours est celui de l’automatisation des reportings.
Si cette crise du Covid-19 a permis l’appropriation de nouveaux outils digitaux, elle a aussi accéléré l’internalisation des études. Certains annonceurs ont donc recours au DIY pour collecter des insights, produire des études et les diffuser en toute autonomie. Cette démarche concerne des veilles quotidiennes et hebdomadaires via des plateformes chez SNCF et de nombreuses études réalisées par les équipes elles-mêmes chez Décathlon.
Enfin le DIY concerne aussi les consommateurs eux-mêmes, amenés à utiliser de nouveaux moyens comme la vidéo pour répondre aux enquêtes (il s’agit d’ailleurs d’une des méthodes de restitution privilégiée chez Tell Me More).
Toutefois, le Do-It-Yourself n’exclut pas la nécessité d’accompagnement. Pour former les équipes en interne guider les équipes et intervenir sur des études plus stratégiques, les agences continuent de jouer un rôle de conseiller et “d’éclaireurs”.
C’est dans cette perspective que Tell Me More favorise Le Do-It-Together en travaillant avec tout un eco-système d’experts (ethnologues, experts UX, facilitateurs, vidéastes) visant à collaborer intelligemment et en fonction de besoins ciblés avec les marques en quête d’autonomie. De la co-construction d’études qualitatives à l’animation de workshops via Mural, Tell Me More combine digitalisation et approches collaboratives, pour délivrer les meilleures expériences possibles.
Au cours de ces 5 évènements, la Journée Nationale des Etudes a mis en lumière les grands changements survenus dans l’écosystème des études depuis le début de la crise sanitaire. Ces tendances identifiées par les experts invités soulignent l’importance de l’hybridation des études, de la co-construction, du DIY et de la digitalisation, dans un monde et des métiers en pleine mutation.
Elles ont surtout réaffirmé l’importance de travailler plus que jamais main dans la main pour accompagner ces transformations et anticiper le monde de demain.